WINTZENHEIM 14-18

Les Alsaciens-Lorrains dans la Grande Guerre


Un siècle après le début de la Grande Guerre, voici le destin particulier de l’Alsace et de la Lorraine annexées racontés par deux historiens spécialisés. Jean-Noël et Francis Grandhomme, dénicheurs d’archives rares et de témoignages précieux, restituent avec une grande clarté quatre années de deuils, de privations, de désarroi. Ils évoquent l’Alsace et la Lorraine champs de bataille ; le destin souvent tragique, parfois romanesque, des jeunes gens combattants dans les armées du Reich ou dans les rangs français ; la vie quotidienne des civils sous un régime de dictature militaire ; le retour festif des « Provinces perdues » à la France en 1918 ; les désillusions de l’entre-deux-guerres ; enfin le lent travail de mémoire et de réappropriation de la parole.

Avec plus de 250 photos inédites extraites des albums de famille des Alsaciens et Lorrains.

Jean-Noël et Francis Grandhomme

La Nuée Bleue, 2013

Le Reichsland Alsace-Lorraine

Au moment du déclenchement du conflit en 1914, l'Alsace et une partie de la Lorraine font partie intégrante de l'Empire allemand depuis deux générations. La défaite française lors de la guerre de 1870 a entrainé, par le traité de Francfort du 10 mai 1871, leur annexion au IIe Reich (1871-1918) nouvellement proclamé. Les territoires annexés reçoivent le statut particulier de Reichsland (Terre d'Empire) dont Strasbourg est la capitale.


Références à Wintzenheim dans le livre

p.44 : Logelbach

Mais la dissolution de l'armée d'Alsace le 28 août entraîne de fait l'abandon du terrain conquis. Mulhouse a été évacuée une seconde fois le 24, mais également Altkirch, Cernay, Logelbach, une partie du Sundgau, ou encore le 31 août Guebwiller et le 3 septembre Munster, tandis que le viaduc ferroviaire de Dannemarie a été dynamité par le génie français pour protéger le repli..

p.47 : Gaede

L'organisation militaire des Allemands est revue dès la fin de la guerre de mouvement : le détachement d'armée (Armee-Abteilung) d'Alsace est confié le 19 septembre 1915 à Gaede, puis, après sa mort (naturelle), au général von Gündell, en septembre 1916. Sur le front lorrain, ce sont les généraux von Falkenhausen, puis von Elsa.

P.80 : Colmar

Les raids aériens ont un fort effet psychologique. "Je viens d'apprendre avec émotion, par les journaux, qu'à Colmar nous avons eu la visite d'avions [français] et que des personnes de ma connaissance ont été tuées, écrit le 19 août 1917 à un prêtre Albert Wehrlé, un soldat du train des équipages alors affecté à Marienburg (Prusse occidentale). C'est vraiment très triste ! Je me fais sans cesse du souci au sujet de mes parents et de mes frères et sœurs qui habitent, malheureusement, dans une zone sensible, à proximité de nombreuses casernes, car ce sont précisément ces bâtiments que vise l'ennemi pour causer de gros dégâts. "

p.122-123 : photo d'Auguste Haeffele

Né en 1889 à Wintzenheim, Auguste Haeffele pose ici en manteau de fourrure. Tout au long de la guerre, il prend de nombreuses photos de ses lieux de cantonnement : à Munster et à Wintzenheim d'abord, puis en Allemagne, en Macédoine et dans les provinces baltes de la Russie. De 1953 à sa mort, en 1960, il assume les fonctions de maire de Wintzenheim (collection Marc Haeffele).

p.125 : photo de Joseph Ingold

Employé à l'aumônerie militaire catholique, sacristain de Wintzenheim.

p.149 : photo de Raymond Boulanger

Groupe de télégraphistes allemands devant un relais télégraphique, en Macédoine. Parmi eux, Raymond Boulanger, ancien notaire à Wintzenheim (collection Marc Haeffele).

P.214 : Pierre Fresnay

Pierre Laudenbach, né à Paris en 1897, est le fils d'un professeur protestant venu de Neuf-Brisach. Il est incorporé au 112e d'infanterie en 1917, puis passe dans l'aviation, où il obtient le grade de sous-lieutenant. Plus connu sous son nom d'acteur, Pierre Fresnay, il est venu plusieurs fois en Alsace, notamment pour y tourner La Grande Illusion (1937) sous la direction de Jean Renoir, avec Jean Gabin et Éric von Stroheim, au Haut-Koenigsbourg et à Colmar ; ou pour inaugurer à Strasbourg la Maison de la radio en 1961.

p.239 : Joseph Hueber

Des Alsaciens-Lorrains participent aussi à la campagne d'Orient. Joseph Hueber, de Wintzenheim, engagé au 2e régiment de marche d'Afrique, succombe à ses blessures à Rabrovo (Serbie) le 8 décembre 1915 lors de la malheureuse tentative des troupes françaises de porter secours à leur allié serbe, écrasé par les forces coalisées des Puissances centrales.

P.245 : Eugène Weber

On trouve des Alsaciens-Lorrains dans le corps expéditionnaire canadien. Le site ancestry.com révèle l'enrôlement dans l'armée du Dominion [le Canada, État indépendant, membre de l'Empire britannique] d'Eugène Weber, né à Wintzenheim.

P.255 : Joseph Kubler

De nombreuses arrestations sont opérées dans les milieux francophiles ou considérés comme tels. Les autorités n'hésitent pas à emprisonner un personnage aussi important que le notaire Joseph Kubler, député de Neuf-Brisach-Andolsheim au Landtag, parce que des papiers du Souvenir français - dont il présidait la section de Wintzenheim-Colmar avant l'interdiction de cette œuvre - ont été trouvés à son domicile. Il n'est libéré qu'en octobre 1915 sur intervention du Bezirkspräsident (président du conseil général de Haute-Alsace) Albert von Puttkamer, à condition qu'il renonce à tous ses mandats politiques.

 p.258 : Pierre Zind

La germanisation, jusque-là progressive et sélective, accordant encore une place à la langue française, devient forcenée, menée aussi bien par les militaires que par les fonctionnaires civils, qui leur sont souvent subordonnés, mais qui se distinguent parfois dans la surenchère pour exister.

Les affiches, enseignes, écriteaux en langue française sont rigoureusement interdits ; le français est prohibé dans les lieux publics ("cafés, restaurants et places publiques", précise un avis - Bekanntmachung - placardé en Haute-Alsace le 14 septembre 1914). "Des formules aussi courantes, même à Mayence et à Darmstadt, que Bonchour, Adié, Au revoir, furent interdites sinon sanctionnées", note l'historien autonomiste Pierre Zind [de Wintzenheim].

p.270 : Colmar

Photo du bâtiment des bains municipaux de Colmar qui est fortement endommagé par le bombardement aérien français du 8 août 1917, durant lequel quatre personnes sont tuées, et qui occasionne aussi d'importants dégâts à l'école d'Unterlinden. [nota : ce bombardement est évoqué dans la chronique de l'école des filles de Wintzenheim].

P.280 : Logelbach

En août et en septembre 1914, lors de la guerre de mouvement, les combats occasionnent d'importants dégâts. A Bourtzwiller, les usines Kumpe & Cie sont en ruine ; de même au Logelbach, faubourg de Colmar, les établissements Scheurer.

P.287 : photo collection Marc Harffelé

En ces temps de disette, des enfants se pressent à la cuisine de campagne pour la distribution de nourriture (collection Marc Haeffelé, de Wintzenheim)

P.288 : Disette

Bientôt, la paille elle-même vient à manquer et il faut ramasser des feuilles mortes pour la litière des chevaux ; ainsi que des plantes médicinales pour remplacer les médicaments produits par l'industrie ; le fruit du hêtre, les noyaux et pépins de toutes sortes pour faire de l'huile. Les glands font fonction de grains de café ; les baies d'aubépine et le sureau sont transformés en confiture ou en compote ; les feuilles de mûre et de fraise deviennent des succédanés de feuilles de thé. Les jeunes cueillirent également des orties destinées à servir d'ersatz de coton. On ne manquait pas d'idées en ce domaine. Vers la fin de la guerre, on avait réussi à tout remplacer, sauf la misère, pour laquelle on ne trouva pas d'ersatz, évidemment. Pour lutter contre la disette, chacun est invité à transformer son jardin en potager et à élever lapins et poules ; ces dernières, précisent les autorités, pouvant être nourries à moindres frais au moyen de hannetons séchés.

p.290-291 et légende p. 292 : Distribution de vivres

Photo : à Wintzenheim (Haute-Alsace), la file d'attente est longue lors des distributions de vivres. Apparemment dans la bonne humeur ici, ce qui sert la propagande (collection Vincent Kauffmann).

p. 296 : Anniversaire du roi de Bavière

Par le biais d'affiches et de cartes postales, on s'efforce de stimuler l'ardeur des soldats et des civils, tout spécialement au cours de l'année 1917, lorsque le moral fléchit. Les visites des personnalités ont la même fonction. Quant aux anniversaires des monarques, ils doivent renforcer la cohésion des troupes. Tous les 7 janvier est célébré celui de Louis III de Wittelsbach, roi de Bavière, là où cantonnent des régiments bavarois. Celui du Kaiser, le 27 janvier, revêt un éclat plus grand encore, partout en Alsace-Lorraine.

p.324 : Laurent Zind

Au cours de la guerre, un grand nombre de prisonniers roumains ont été déportés par les Allemands en Alsace-Lorraine, où beaucoup sont morts de faim et de mauvais traitements. "C'est un de mes pénibles souvenirs d'enfance de voir ces malheureux, en passant dans les rues de Wintzenheim, ramasser des crottes de cheval et les porter à la bouche ! écrit l'abbé Laurent Zind. Des femmes qui tentaient de leur porter un peu de café ou de nourriture se voyaient repoussées à coups de crosse par les gardiens".

P. 326 : Terre de peine

Vidée de ses forces vives, mobilisées ; devenue plus que jamais zone de cantonnement et de passage de troupes ; réduite progressivement à une quasi-famine, frappée par les épidémies ; terre de peine pour les prisonniers, l'Alsace-Lorraine l'est aussi pour beaucoup de ses propres habitants : femmes, enfants, réformés, personnes âgées. Sur le front intérieur dominent, surtout en 1918, souffrances physiques et morales. Chacun se demande de quoi demain sera fait.

P. 347 : Florine Langweil

La mécène et marchande d'art extrême-oriental Florine Langweil (née à Wintzenheim en 1861) fonde et accueille chez elle en 1915 La Renaissance des foyers en Alsace, une œuvre de secours aux réfugiés. Elle organise également des expositions d'aide à l'armée.

p.395 : Rue Clemenceau

Photo : le 4 janvier 1919, des soldats français participent à une prise d'armes à Wintzenheim devant la maison du négociant en vins René Birgy dans la Hauptstrasse, rebaptisée rue Clemenceau par le conseil municipal le 9 mars 1919. La plupart des communes de l'ancien Reichsland francisent ainsi leur toponymie après la "délivrance". 


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